mardi 6 mars 2012

A-RRI-VÉS !

Et voilà... avec 16 568 kilomètres au compteur et 22 pays traversés, nous sommes bien arrivés dimanche midi, à Mantallot !

Encore des retrouvailles !
Difficile de rendre « intéressants » sur ce blog tous les moments chaleureux que nous avons vécu ces derniers jours, à sillonner la France de maisonnée en maisonnée, retrouvant tous les soirs des amis et des proches éloignés depuis un an... Nous quittons Poitiers accompagnés de Marc, pour rouler vers Le Grand Pressigny, où nous retrouvons Florian, un ancien coloc de Thomas. Le lendemain nous sommes à Vouvray, chez Julie et Nicolas... puis à Saint-Aubin-de-Luigné, près d'Angers, chez une cousine d'Elise.



Deux jours plus tard nous arrivons à Rennes, où nous retrouvons pas mal de monde... Nous vivons notre journée de restitution la plus « intense », avec un déjeuner « conférence de presse » avec une douzaine de collègues de Thomas, puis un café chez un pote, suivi d'un goûter chez d'autres copains, et enfin une soirée chez les parents d'un autre ami... Même si chacun fait l'effort de ne pas nous asséner de questions, l'exercice s'avère un peu épuisant !!



Après Rennes, nous passons visiter la famille d'Elise dans le Mené, puis arrivons en Centre-Bretagne, à Glomel, chez une amie... qui a invité 6 autres potes du « Kreiz » pour l'occasion ! Trois copains nous rejoignent à ce moment là : Erell (qui avait roulé avec nous en Croatie), Olivier et Iuna. On pédale tous les cinq jusque Loguivy-Plougras, où Janick a déjà invité un petit groupe de trégorois pour partager une soirée pizza autour du poêle de masse fraîchement inauguré.Un énorme merci à tous nos hôtes pour tous ces bons moments partagés !



Sans être chauvin...
En 3 semaines à travers la France, du pays basque jusqu'à la Bretagne, reçus tous les soirs chez des amis, des proches, ou des hôtes de Couch Surfing tous plus accueillants les uns que les autres, force est de constater que nous n'avons pas mangé deux fois la même chose (sans tenir compte des sandwiches du midi).
Alors, en guise de clin d’œil à tous nos amis voyageurs qui sont encore sur les routes du monde à manger des soupes de nouilles à tous les repas, nous nous faisons le malin plaisir de lister les délices dont on nous a régalé sur notre route du retour :


Lasagnes aux poireaux, au chèvre et au saumon à Mauléon-Licharre, pain maison-reblochon-vin rouge puis dal de lentilles à Pau, confit de canard et pommes de terre à Villeneuve de Marsan, courge butternut et salade d'hiver à Sore, raclette puis salade de riz sur le bassin d'arcachon, spaghetti bolognaise dans le Medoc, rosbeef et pommes frites à Royan, pâtes au chou dans les Deux Sèvres, crêpes à Poitiers, assiette de charcuterie au Grand Pressigny, gratin savoyard à Vouvray, quiche lorraine à Saint-Aubin, tarte aux poireaux à Chateaubriant, canelloni fourrés au saumon à Bruz, bœuf lentilles à Vezin le Coquet, galettes saucisses dans le Mené, tajine d'agneau à Glomel, pizzas maison à Loguivy Plougras, et poulet pommes frites à Mantallot !
Des retrouvailles et des repas tellement arrosés que nous sommes arrivés dans les Côtes d'Armor un peu saturés... et que, maintenant que nous nous arrêtons de pédaler, il va falloir faire attention à notre régime alimentaire !



Final en beauté
On quitte Loguivy-Plougras dimanche matin à 9h, accompagnés d'Erell, d'Ywann et de Myriam. A Plounevez-Moedec, on ramasse au passage Erwan, non sans s'être arrêtés boire un petit jus avec la famille Hemeury... Le temps est froid, gris, et il pleut quasiment sans discontinuer... les premières pluies de l'hiver, nous dit-on ! Pour couronner le tout, le vent du Nord ne tarde pas à s'en mêler, balayant le bocage de ses bourrasques glaciales...
Toujours en groupe, nous passons par Le Vieux Marché, la commune où nous habitions avant ce voyage, et refaisons ce trajet que Thomas effectuait tous les jours à vélo pour rejoindre la petite gare TER de Plouaret-Trégor... Le bourg n'a pas l'air d'avoir changé, et la jolie petite route qui descend dans les bois vers le Saint-Ethurien puis remonte vers la chapelle des Sept-Saints non plus. Quel bonheur de rouler chez nous, de retrouver ces lieux si familiers...



Nous franchissons le Léguer, passons le bourg de Pluzunet, puis arrivons au pont sur la voie express Guingamp-Lannion. Erwann et Ywann, qui roulaient en tête, ralentissent discrètement pour nous laisser en tête... Et là, encore une fois, c'est la surprise !! Au détour du virage qui suit, nous découvrons une meute de quarante copains à nous attendre, sous la pluie battante et le vent glacial, avec des drapeaux de bienvenue, et un bouquet de fleurs « Mantallot – Mantallot, 26/02/2011 – 4/03/2012 » !...
Voila une surprise qui fait vraiment chaud au cœur. Une surprise qui ne coûte rien, une surprise qui n'est pas matérielle... juste la joie de retrouver tous ces gens qui ont voulu nous entourer pour notre retour à Mantallot... C'est tellement beau !

Peu de photos de ce grand instant d'émotion : forcément, sous l'intensité du moment, je n'ai pas pensé à sortir l'appareil... Je lance donc un grand appel à ceux qui étaient présents et qui ont pris des photos au carrefour de Breizh Izel, puis sur la route !! Merci de nous les envoyer par e-mail !!


On reprend la route ensemble, une vingtaine de biclous, plus quelques voitures en feux de détresse, provoquant un bouchon monstrueux sur la départementale ! Un quart d'heures plus tard, nous arrivons finalement à Boudillo, la ferme des parents d'Elise, le point de départ du voyage il y a un peu plus d'un an... Tout cela s'achève en toute simplicité par un petit pot de l'amitié à la salle des fêtes de Mantallot. Un énorme merci à tous pour ce super cadeau, on ne pouvait rêver mieux comme arrivée !



Les photos des dix derniers jours :
20120305 - France 2


Et maintenant ?
La question que tout le monde se pose à présent !On a déjà vidé entièrement nos sacoches, et lancé une machine à 30°C pour les synthétiques. On a enfilé un jean et un tee-shirt propres, et quitté polaires et doudounes pour de confortables pull-overs en laine... Il va nous falloir remettre la main sur toutes nos petites affaires dispatchées à droite et à gauche pendant le voyage (bouquins, cartes, carnets de bord...), et se réapproprier le contenu d'une garde-robe que nous ne soupçonnions plus.
On s'installe temporairement chez Eloi, un ami du Trégor, et montons sur Paris dès dimanche prochain, revoir la famille de Thomas ainsi que d'autres amis.Elise part à Melle, dans les Deux-Sèvres, le 18 mars, pour y suivre une formation de 5 mois sur l'élevage caprin. Thomas rembauche à l'Agence Locale de l'Energie de Saint-Brieuc le 2 avril prochain ; il pense s'installer en colocation sur Rennes, pour profiter de la vie culturelle rennaise, jusqu'au retour d'Elise. Une période de séparation géographique qui risque sans doute de « faire bizarre » après un an de vie commune... mais ne vous inquiétez pas, ça ira !

Le blog s'arrête ici. On tenait à vous adresser à tous un énorme merci pour l'avoir suivi avec autant d'assiduité, ce fut un plaisir pour nous de pouvoir vous y faire partager notre périple...On va essayer de vous mettre à disposition une version PDF du blog, pour que les « aficionados » puissent l'imprimer, le relier et le relire bien au chaud au coin du feu pendant les longues soirées d'hiver...


Nos coordonnées pour finir :
Thomas : thomlw AT gmail.com – 06 81 93 72 11
Elise : eliselaudren AT yahoo.fr – 06 10 58 02 14
Amis voyageurs, si vous préparez un voyage à vélo autour du monde, n'hésitez pas à nous contacter !

Merci à nos parents, nos proches et à tous nos amis...

mercredi 22 février 2012

Premiers tours de roue en France

Froid sibérien
La « ola de frio siberiano » annoncée à la télé espagnole est bien au rendez-vous à notre descente du bus à Irun, à 7 heures du matin. Emmitouflés dans nos doudounes et nos cagoules, on remonte illico les bicyclettes et filons en grelottant, dans un air glacial, vers le pont-frontière. Et hop, nous voilà en France ! Pas le temps de festoyer devant le panneau, ni même de prendre une photo, il fait bien trop froid, on file donc se réfugier dans le premier café venu, chez José, en face de la gare SNCF de Hendaye.
Un type bourru nous accueille d'un grognement avant de nous servir un thé à 3,80 € et de nous refuser une prise de courant pour recharger notre portable... Bienvenue en France ! On quitte là Ywann et Myriam, qui rentrent sagement en train, et prenons la route alors que le soleil peine à percer l'épaisse couche de nuages et à réchauffer l'air gelé. Le thermomètre de la pharmacie du coin annonce – 7°C...


Dernier pépin technique ?
Deux heures plus tard, alors que nous renouons avec le plaisir de crapahuter sur les petites « routes blanches », CRAC, c'est le câble de dérailleur arrière de Buzuk qui pète. Un pépin sans gravité, normalement réparé en 2 minutes chrono avec le câble de rechange emporté dans les sacoches... mais là cela s'avère plus compliqué, car le câble s'est cassé dans la manette de dérailleur, et, avec les mains gelées, j'ai beaucoup de mal à l'en extraire... Je règle la vis de butée pour positionner le dérailleur sur le pignon n°6, et Elise pédale ainsi, à pignon fixe, jusqu'au patelin suivant, Ainoah.
Bref instant d'émotion, c'est là qu'on avait passé notre réveillon de l'an 2009. On y trouve une place au chaud dans un salon de thé mais, même avec les outils prêtés par la sympathique gérante, impossible d'extraire ce maudit câble : il s'est effiloché en sa cassant et les petites filoches de câble l'ont définitivement coincé dans la manette. Quant à la manette, elle est bien sûr indémontable.
Le petit artisan vélociste du patelin suivant nous confirme l'absurdité de la situation : pour un simple câble cassé, il nous faut changer la manette de dérailleur. C'est ballot non ? D'autant plus que lui, il n'en a pas en stock ! Elise continuera donc courageusement 3 jours sur un seul pignon, par monts et par vaux sur les reliefs du pays basque, jusqu'à ce que nous trouvions à Pau un magasin de sport où racheter une paire de manettes de dérailleurs neuves...


Du Pays Basque jusqu'au Poitou
Depuis Hendaye, tout au pied de la longue et rectiligne côte aquitaine, nous traversons le pays basque jusqu'à Pau, par un froid mordant. Nous remontons ensuite vers la forêt des Landes, pour une longue « traversée du désert » (ça rappellerait presque l'Ouzbekistan!) jusqu'au bassin d'Arcachon. Nous y faisons escale quelques jours chez Luc, puis reprenons la route pour remonter toute la pointe du Medoc, sur de longues pistes cyclables entre les dunes et les pins... Les stations balnéaires bondées en été sont désertes, et ressemblent à des villes fantomes.
A la pointe de la Grave, nous embarquons sur un bac pour traverser l'estuaire de la Gironde, et accostons à Royan ; nous poursuivons ensuite notre route au milieu des marais charentais puis des collines poitevines jusqu'à Poitiers, où nous sommes arrivés hier soir.
Déjà 600 km de parcourus depuis Hendaye, la France nous paraît maintenant bien petite et on a l'impression de traverser le pays comme l'éclair ! Nous renouons avec le plaisir de sillonner les petites départementales, de patelin en patelin, et de demander notre route aux petites mamies et aux employés communaux. Peu de visites « touristiques », en revanche on fait régulièrement des descentes d'enfer dans les maisons de la presse et les boulangeries qui jalonnent notre route...


Encore des rencontres...
Depuis notre retour en France, la tente n'a pas quitté le fond des sacoches ; par les températures ambiantes, on ne va pas s'en plaindre ! Grâce aux réseaux d'hospitalité CouchSurfing et WarmShowers, on continue de faire escale ici et là chez des hôtes d'un soir : à Villeneuve-de-Marsan, une famille soudée, deux parents deux enfants (8 et 4 ans), qui se préparent à partir pour un tour du monde à vélo de deux ans – soirée-interrogatoire garantie !
A Sore, un éleveur de chèvres et de brebis perdu en pleine forêt des Landes, avec son fils qui vend sur les marchés des pâtes à tartiner bio et de l'eau dynamisée. A Carcans-Plage, une coloc un peu gipsy d'étudiants bordelais qui ont délaissé la ville, préférant surfer sur les plages de Lacanau plutôt que d'assister aux amphis...


...et déjà des retrouvailles !
Continuer à pédaler tous les jours, continuer à faire des rencontres et des découvertes, rester sur notre rythme itinérant en changeant de lit tous les jours, tout cela nous maintient encore dans l'état d'esprit du voyage... mais petit à petit, on retrouve aussi famille et amis sur notre route, pour notre plus grand plaisir :
A Mauléon-Licharre nous retrouvons Laure, une amie du pays basque qui a suivi assidûment le blog, et nous accueille en fanfare avec sa légendaire joie de vivre et une gigantesque assiette de charcuterie ! A Pau, on passe un week-end avec des collègues de fac d'Elise, entre apéro au Jurançon et dégustations de Saint Nectaire, ballades sur les coteaux dans l'air vif de l'hiver et longues discussions dans le salon au coin du feu...
Sur le bassin d'Arcachon on retrouve le frère et la sœur d'Elise, Luc et Anaïs, descendue de Bretagne pour l'occasion avec la petite Chloé, deux ans déjà, des yeux qui pétillent, des joues à croquer et un sourire à tomber par terre ! Nous quittons le bassin d'Arcachon avec Luc et Perrine, une cousine de Thomas venue de Bordeaux pour pédaler le week-end avec nous.


Un peu plus haut, Jean-François, un oncle de Thomas, vient nous accueillir à la descente du bac à Royan, du haut de son vieux course Peugeot des années 60, retapé pour l'occasion ; il nous conduit jusqu'à Saint-Palais, où nous sommes accueillis comme des rois et retrouvons – encore une surprise ! - Mamine, la grand-mère de Thomas ! Jean-François ré-enfourche sa bicyclette le lendemain pour parcourir 35 km avec nous sur la route pour St Jean d'Angely...

C'est ainsi que de jour en jour, on se replonge petit à petit dans le quotidien de la vie ici, en discutant baraques, bébés, boulot et politique, au lieu de visas, de marque de tente et de pépin de dérailleur... Thomas s'est déjà enfilé un hors-série du Monde sur le nucléaire, le dernier numéro de La Maison Ecologique, et tout le scénario Negawatt 2012 ; et Elise a profité du passage par Melle (79) pour rencontrer les formateurs du lycée agricole où elle viendra peut-être suivre une formation dès le mois prochain... Bref, on est encore en voyage, mais déjà dans l'après... décidément, rien ne nous changera, on est ainsi faits !


Prochaines étapes : Vouvray, St Aubin du Luigné, Rennes, Collinée, Glomel et Loguivy-Plougras. Arrivée prévue à Mantallot dimanche 4 mars... A tout bientôt !

Quelques photos, comme d'habitude :
20120222 - France 1

mardi 7 février 2012

Galicia, oh la la !

Lapierre et Lerose arrivent à Porto 
Porto, vendredi 27 janvier. Nous retrouvons nos amis Ywann et Myriam à l'aeropuerto de Porto (décidément ces derniers jours, on traîne beaucoup dans les aérogares!), et les accompagnons jusqu'à une petite auberge de jeunesse en ville où nous allons rester 2 nuits. Quel plaisir de retrouver des potes, de bavasser des heures, d'éplucher les derniers ragots du Trégor, d'avoir des nouvelles fraîches des copains, des bébés, des chantiers... Après avoir remonté leurs deux vélos, inévitablement baptisés Lapierre et Larose (spécial dédicace aux fournisseurs d'équipement), on sort écumer Porto, dans une magnifique lumière d'hiver. Il subsiste, cachés dans les ruelles, de sympathiques petits bars plus ou moins typiques, où des mamas en tablier vous servent un vino de casa sur une nappe en toile cirée, avec une assiette de pain de seigle version parpaing, un peu lourd mais délicieux ! Ainsi attablés autour d'une carte du Portugal et du Nord de l'Espagne, on réfléchit à l'itinéraire... nous devons impérativement arriver dans les Pyrénées pour le 10 mars. On pourrait couper au plus court, mais il paraît que les paysages de la Galice, sur la côte ouest, sont plus jolis... c'est décidé, direccion Galicia ! C'est aussi dans ce petit bar que nous rencontrons la « manageuse » d'un groupe de musique qui se produit ce soir dans une petite salle pas loin, un groupe de « fado blues world music » qu'elle nous recommande fortement (et, bien sûr, très objectivement). Allez hop, ça fait longtemps qu'on a pas été à un concert... on ne sera pas déçu, ce fut peut être le concert le plus pourri de toute notre vie, deux déjantés qui braillent (faux) dans un mégaphone, dans une salle comble (au moins 15 personnes)... mais la manageuse nous a arrangé une « spécial dédicace » pour les « bikers du monde », et nous offre même un CD (on vous le prêtera), alors ça rattrape tout et on ressort (avant la fin) en ayant bien rigolé ! 

Premières étapes 
On quitte Porto à vélo pour Guimares, une petite étape de 50 km pour le démarrage d'Ywann et Myriam. Jolie cité de pierre envahie de promeneurs en ce dimanche ensoleillé, où on trouve à nouveau à nous loger chez les pompiers... 
On dîne en compagnie de l'équipe de garde et dormons dans la salle polyvalente – sans doute celle qui doit servir au bal des pompiers. Sur la route qui nous mène vers l'Espagne, les encouragements fusent... un papy à qui nous demandons le chemin nous guide en voiture, puis nous redépasse en klaxonnant, puis nous attend à un virage quelques kilomètres plus loin pour nous re-saluer... un autre type nous conduit en mobylette pendant 10 kilomètres, de croisements en croisements, pour trouver un raccourci... A Ponte de Barca nous dormons encore chez les bombeiros, après avoir dîné d'un double steak – patates frites + plâtrée de riz à l'huile + soupe de légumes + fruits au sirop + pichet de rouge maison pour 5,5 € chacun dans un petit restaurant ouvrier. 
Les routes du Portugal ne font pas de cadeau à Ywann et Myriam : le lendemain nous attaquons de vraies petites routes de montagne, et passons un col à 700 mètres (en partant du niveau de la mer ce n'est pas rien !). Ce qui nous attend en Galice ne sera pas décevant, une semaine de montagnes russes avec des côtes à 15% et pas beaucoup de moments plats ! 

Espana ! 
On passe la frontière en franchissant un pont baptisé, de manière fort originale, « puente de la amistad ». Alors que le soir tombe et que la pluie arrive, on se réfugie chez Brais et Javier, nos premiers hôtes espagnols. Dire qu'ils sont membres de « Warmshowers », ce réseau d'hébergement entre cyclistes, pourrait prêter à confusion car ils vivent dans une maison non chauffée, où l'eau chaude est rare... ce sera donc douche froide ! Ils logent ici gratuitement, et se nourrissent de récup de produits périmés dans le supermarché du coin... de sacrés loulous ! Tous deux nous conseillent vivement d'éviter le Sud de la Galice, très urbanisé, pour profiter davantage de la côte Nord, plus sauvage. Le lendemain, on roule donc, sous la pluie, jusqu'à Vigo, une ville plutôt laide, d'où nous prenons aussitôt un train pour Padron, 80 kilomètres plus au Nord. 
Nous arrivons bien tard à l'auberge des pèlerins de Compostelle, près du couvent de Carmen. La dame en robe de chambre bleue qui nous y accueille, assez froidement, nous dévisage et nous demande nos « credencial », ces passeports que les pèlerins font tamponner à chaque étape de leur chemin vers Saint Jacques. Nous n'avons pas de credencial, nous ne sommes donc pas de vrais pèlerins, décrète-t-elle d'un air méprisant. Mais bon il y a quand même de la place pour nous ce soir... Ouf... 

Le centre Bretagne au bord de la mer 
Le lendemain nous arrivons à Noia, une petite ville au bord d'un ria qui rappelle franchement l'Irlande. Deux allemandes nous accueillent chez elles et se mettent en quatre pour nous fournir tout un tas de tuyaux pour la suite de notre route : des photocopies de cartes, des bons plans bivouacs, des noms de jolis patelins et de bars sympas, des petits chemins praticables à vélo... Merci Anette et Eva ! 
Pendant 3 jours on va parcourir ainsi la côte de la Galice, où s'éparpillent des petits villages, beaucoup d'habitat diffus, et des séchoirs à maïs en granit dans tous les jardins. Tout ça ne va pas sans nous rappeler la Bretagne bien sûr... 
En fait, la Galice, c'est un peu le centre Bretagne au bord de la mer ! On bivouaque sur des plages désertées à cette période de l'année, sur lesquelles roulent de puissantes vagues amenées par la houle d'hiver de l'Atlantique. Quel bonheur de retrouver notre grande tente, dans laquelle on peut même inviter Ywann et Myriam à dîner quand tombe la nuit et le froid ! Seul problème, le sable s'invite partout, dans les fermetures éclair, le brûleur à essence, les fixations des sacoches et les chaussettes... Rrrrr... et les puces de sable qui sautent dans la gamelle de pâtes du dîner, mmmh !! 

Fisterra 
Au Cap Finisterre, nous touchons le bout du monde, ou du moins le bout de l'Europe. Les puristes diront que le point le plus occidental de l'Europe continentale n'est pas là mais au Cabo da Roca, au Portugal... il n'empêche que le Cabo Fisterra est bien le plus impressionnant, une vaste péninsule qui s'enfonce profondément dans l'océan et sur laquelle on se retrouve encerclé par l'horizon marin... Il y a deux mois on touchait de nos roues l'océan Pacifique au Vietnam, et maintenant nous voilà à l'autre bout ! Au Cabo Vilan, on dépasse un phare et un grand parc de majestueuses éoliennes, pour s'engager sur le chemin des anglais, qui longe une côte sauvage battue par les vents... des paysages à tomber par terre, d'ailleurs on s'arrête tellement souvent pour les contempler qu'il est difficile d'avancer beaucoup ! La pluie tombe parfois, mais avec les vestes et pantalons imperméables, et les – désormais célèbres – surchaussures (!), nous sommes tous les quatre complètement équipés pour pouvoir rouler sans que les gouttes ne nous arrêtent ! 

A Coruna 
Les côtes n'en finissent plus, on monte et on descend, et on finit par se sentir un peu sales tout de même après 3 bivouacs dans le froid ! On finit malgré tout par arriver à La Corogne hier, où Javier, Beito, Davis et Jesus nous accueillent dans leur coloc'... Avec eux on se met tout de suite à l'heure espagnole, apéro jusqu'à 22h, dîner dans un bar à tapas jusqu'à minuit, puis fin de soirée dans un pub jusqu'à... 4 heures !!! Oh là là, on a pas vu tourner l'heure tellement on a passé une bonne soirée, à enchaîner les liqueurs de café (spécialité locale) et à discuter de la langue galicienne (qu'ils parlent tous les quatre)... 
Aujourd'hui, c'est donc un lendemain difficile, un peu mal aux cheveux comme on dit, alors on est pas franchement efficaces... Ça tombe bien, pas de vélo prévu, ce soir on prend le bus direction Irun, à la frontière française ! Eh oui, c'est que nous avons d'autres rendez-vous prévus, peut-être tout aussi festifs : ce week-end nous retrouvons des amis à Saint-Faust, à côté de Pau... Alors manana estaremos en Francia, demain matin on sera en France, et gare au premier croissant aux amandes qui croisera notre chemin ! Ça fait bizarre...
20120207 - Galicia

vendredi 27 janvier 2012

La magie du complot


Jeudi 19 Janvier, 13h20, notre avion survole Lisbonne. Vue du ciel, la ville paraît magnifique: la mer, la rivière du Tage, les toits en tuile, le tout sous un soleil brillant...


Une fois l'avion posé, et les sacoches récupérées sur le tapis, nous rejoignons au pas de course la sortie définitive. La porte s'ouvre et là, on entend « WAOOUOUOU » et on voit Pauline sautiller partout avant de se ruer dans les bras de son grand frère... J'essaye de prendre quelques photos mais c'est tellement dur de ne pas se joindre à eux ! Les images sont toutes floues mais le souvenir de ces premières retrouvailles est très clair !
Nous découvrons l’appartement très charmant de Pauline et restons deux bonnes heures à bavasser en buvant du thé. En fin d’après-midi nous allons faire un petit tour dans le joli quartier de Belem, au pied de chez elle. On retrouve avec plaisir les petits conforts de la vie européenne, à commencer par la politesse des conducteurs qui vous cèdent le passage en souriant, ou la langue qu'on peut déchiffrer et comprendre sans trop d'effort... Nous nous laissons guider et ne cessons de répéter : « C'est trop joli ici, la langue est si belle, l'air est si agréable... ». Bref, on a du bonheur qui coule dans les veines !


A la nuit tombée, en sortant d'un café où nous avions dégusté des Pasteis de Natel (la meilleure pâtisserie de Lisbonne), nous passons un petit coup de téléphone en France pour prévenir nos parents de notre arrivée : ceux de Thomas se disent bien tristes de ne pas être là avec nous ce week-end. On règle ensemble les derniers détails logistiques du matériel et des affaires que Benoît, le frangin, doit nous ramener le lendemain... ; quant à ceux d’Élise, leur téléphone est en dérangement...
Le lendemain, 14h15, nous sommes de retour à l'aéroport. Assis à la terrasse d'un café dans l'aérogare, nous sirotons un café avec Antoine, tout juste arrivé de Lyon, en attendant Benoît, dont le vol en provenance de Paris doit arriver d'un instant à l'autre... Nous sommes si impatients d’être « au complet ».

14h45. Le vol de Benoît est annoncé « arrivé ». Nous nous plaçons devant la porte des arrivées et, 10 minutes plus tard, le voilà qui sort ! Nouvelle scène de retrouvailles, la 3e en 2 jours...c'est tellement génial de se sauter dans les bras après 11 mois d’éloignement !
Thomas s'étonne de la petite taille des bagages de Benoit, qui doivent normalement contenir, en plus de ses affaires, notre ravitaillement pour le dernier tronçon du voyage : une tente, un duvet, des doudounes, des gants et des cagoules, un pantalon de pluie, un pneu, un porte bagages et deux sacoches... Qu'importe, on verra ça plus tard, nous sommes heureux de nous retrouver et retournons boire un café tous les quatre au même endroit.
Ensemble on commence à discuter du programme du week-end : on logera chez un ami de Pauline car son appartement est trop petit, on ira se balader au bord du Tage, on ira visiter...STOP ! Quelqu'un vient de me cacher les yeux et j’entends tout à coup le petit rire de maman. MAMAN ! PAPA ! C'est pas vrai ! Hugues, Catherine : c'est pas vrai ! Je regarde Thomas pour essayer de comprendre mais lui aussi est aussi stupéfait que moi....
Difficile de réussir à décrire cette scène magique mais heureusement vous pouvez avoir un petit aperçu avec la vidéo qu'Antoine a prise :


C'est tout simplement incroyable ! Même si on nous l'avait dit, on y aurait pas cru ! Arrivés par le même vol que Benoît, nos quatre parents nous font la surprise de venir nous retrouver pour le week-end à Lisbonne... Le complot est fomenté de longue date entre eux, tout le monde est au courant bien sûr, sauf nous, qui tombons de bien haut !
S'en suit un très, très agréable week-end dans cette jolie ville qu'est Lisbonne, sous un soleil radieux qui réchauffe la peau, procurant une inimitable sensation de bien-être... Un week-end fait de visites et d'instants tous simples mais inoubliables.


Antoine et les nos parents repartent dimanche en fin d'après-midi. Et oui, toutes les bonnes choses ont une fin et il y en a qui ont du boulot. On ne pouvait pas rêver mieux comme retour et c'est un si beau cadeau qu'on a du mal à s'en remettre... Alors un grand merci à tous les comploteurs !
Heureusement, Benoît et Pauline sont toujours là. Les courageux vont pédaler avec nous jusqu'à Aberga des Dozes, à 200 km au nord de Lisbonne. Après la sortie de la capitale, peu agréable, nous rejoignons enfin les petites routes de campagne. Quel plaisir de rouler à travers les champs d'oliviers et de chêne-liège, et les petits villages peuplés de personnes âgées... Nous dormons dans les casernes de pompiers, étapes des pèlerins sur le chemin de Saint-Jacques.
Dès que nous demandons la route, les portugais se donnent à cœur joie de nous indiquer le chemin et certains vont même jusqu'à faire plusieurs kilomètres en voiture ou en scooter devant nous pour être surs que l'on ne se trompe pas ! Le relief n'est pas des plus faciles : ça n’arrête pas de monter et descendre et pourtant Benoît et Pauline nous surprennent : on fera 100 km dans une journée. Enfin, pour notre dernier jour de route ensemble, nous allons jusqu'à une petite gare d'où ils repartent pour Lisbonne.


Pour notre part on continue sur Coimbra, où nous sommes logés ce soir chez un couple d'espagnols, puis Porto demain, où nous retrouverons deux amis trégorrois... Ce Portugal que nous traversons à toute vitesse est très attirant ; une chose est sûre, nous reviendrons parcourir ces villages et ces petites routes à vélo !

Un peu plus de photos ici :
20120126 - Portugal 1

jeudi 19 janvier 2012

Vol TK1759 à destination de Lisbonne : Embarquement immédiat !

Après 11 mois passés à rouler à une moyenne entre 15 et 20 km/h, ça fait un peu bizarre... Par la magie des airs, nous avons été propulsés en quelques heures cette nuit à Istanbul, à près de 10 000 kilomètres de la Thaïlande... Et cet après-midi, nous serons à Lisbonne !
Profitons de cette correspondance pour vous donner quelques nouvelles...

Quadruple marathon
Notre dernière journée de vélo en Asie fut mémorable : 8h de pédalage, 168 km, dont une cinquantaine dans le trafic effréné des banlieues de Bangkok, et l'arrivée de nuit dans le centre-ville ! Le « record » précédent (140 km entre Turkmenabat et Boukhara) est littéralement explosé !


Les mollets ont tourné comme des vrais petits moteurs toute la journée. Mais il faut dire que la motivation était à son comble pour atteindre Bangkok le soir même : c'est bien la preuve définitive que tout est dans la tête, pas dans les cuisses !

En boîte à Bangkok
Nous passons 4 jours dans cette étourdissante métropole cosmopolite, essentiellement consacrés à préparer nos bagages et nos petits vélos pour le vol retour...


Session emballage des petits vélos dans des boîtes spéciales :
ils voyageront avec nous, dans la soute !

C'est ici que va s'achever notre périple asiatique : ce soir là nous prenons l'avion, un A340 même !
Un quoi ?
" Un A340, c'est un Airbus long courrier, un quadri-réacteur.
" C'est bien comme avion ?
" Ben, j'aurais préféré essayer l'A380, celui à 2 étages... Mais bon, l'A340 c'est quand même pas mal...
" Ah ouais ? OK..."


Iyi Aksamlar Captain !
Petit mot glissé à l'attention du commandant de bord, en embarquant dans l'Airbus pour Istanbul :
We left France in february 2011, cycled 14 000 km and crossed 20 countries to reach finally Thailand. Turkey was maybe our favorite country because of the hospitality we met in the villages : that's one of the reasons why we choosed to fly with Turkish Airlines !
Now we're heading back to Europe. We'd love to come and visit the cockpit, in order to see if borders are easier to cross by flying over them rather than overland !
Looking forward to meet you soon,
Thomas and Elise (seats 32J and 32K)

L'hospitalité turque ne faillit pas ! 3 heures plus tard, quelque part à 10 000 mètres au dessus de l'Inde, nous voilà admis à l'avant... Nous racontons aux pilotes que chaque heure de vol correspond environ a 1 mois à vélo... ce qui les fait bien rigoler !


Brève escale à Istanbul, juste le temps de déguster un cay dans l'aérogare et d'admirer le détroit du Bosphore vu du ciel... et nous arriverons à Lisbonne cet après-midi en milieu de journée. Nous y retrouvons Pauline, la sœur de Thomas, qui habite et travaille là-bas, ainsi que Benoît et Antoine, les deux frangins, qui descendent au Portugal pour l'occasion... des retrouvailles chaleureuses pour compenser le choc thermique !

Alors, ça fait quoi ?
Non, nous ne sommes pas tristes de rentrer en Europe... nous sommes même plutôt impatients ! D'autant plus que ce retour ne marque pas la fin du voyage puisque nous allons encore pédaler un bon mois et demi. Notre but n’était pas d'arriver jusqu'en Asie du Sud-Est, mais bien de faire la boucle toute entière.
Malgré tout, on ne peut pas s’empêcher de faire un petit bilan de ces 11 mois et 14 000km : beaucoup de bonheur, de découvertes, de rencontres, et de chance, puisqu'on rentre en pleine forme (et nos petits vélos aussi) !
Pour l'instant on a l'impression d'être prêts à retrouver des choses connues, mais on vous dira si tel est le cas dans quelques semaines...

Retour en France... deemandez le programme !
Et maintenant, voici, mesdames et messieurs, LE programme du retour en France...



Comme vous le voyez, quelques étapes au fil du chemin vont nous permettre de retrouver amis et famille... A toutes celles et ceux qui veulent faire un bout de route avec nous, vous êtes les bienvenus avec vos bicyclettes !

vendredi 13 janvier 2012

Et de 14 000 !

Bonjour !

Nous voila a 175 km de Bangkok seulement... et nous avons passe hier matin les 14 000 kilometres depuis le depart de Mantallot !


Rouler le long de la cote n'est pas chose deplaisante, et nous avons eu, pour notre premier jour en Thailande, une jolie surprise en fin de journee :


En revanche, le pneu arrière d'Aranda a définitivement rendu l’âme ; nous l'avons remplace par un pneu Camel, Made in Thailand, dans un petit garagiste a scooters. Les adieux de Thomas a son fidèle Marathon XR, qui avait roule depuis la France, furent déchirants...

 

mercredi 11 janvier 2012

Coup de coeur pour les khmers


Une frontière sur le fleuve
Une fois n'est pas coutume, nous franchissons la frontière entre le Vietnam et le Cambodge non pas à vélo, mais confortablement installés à bord d'une embarcation pour touristes, qui remonte le Mekong jusque Phnom Penh.


Mais ce qui nous change surtout, c'est d'arriver dans un pays par sa capitale, et non par ses confins : une petite heure après avoir franchi la ligne frontalière sur le Mekong, notre bateau longe la promenade de Phnom Penh, où une ribambelle de drapeaux flotte au vent devant les toits dorés du Palais Royal, puis accoste en plein centre-ville.

Mutilés et Land Cruiser
Phnom Penh est une très charmante petite capitale. Certes, il y a des inégalités criantes : ces enfants qui fouillent dans les poubelles, ces mutilés qui mendient à tous les coins de rue, ces vieillards qui errent en guenilles, alors que les riches cambodgiens circulent dans des 4x4 rutilants, Mercedes, Lexus ou Land Cruiser. C'est le lot de toute capitale que de réunir la plus extrême pauvreté et la plus grande richesse ; mais ici plus qu'ailleurs, le contraste nous saisit.

Femmes devant un temple de Pnom Penh

Mais il y a tout le reste, les jolis temples, les maisons coloniales, les avenues bordées d'arbres, et surtout cette animation permanente : les séances de taï-chi ou de fitness en pleine rue, dans la lumière du petit matin ; les joueurs de football, de badminton, de volley ou de tot-sey *, qui envahissent les parcs et les esplanades en fin d'après-midi ; les ados qui se retrouvent sur la promenade à la nuit tombée pour faire du hip-hop...
* tot-sey : sport populaire au Cambodge, qui se joue en cercle avec un petit volant genre badminton. Lire cet article...

Khmers Rouges
En voyant cette frénésie, on a du mal à s'imaginer la ville fantôme, entièrement vidée de sa population par les Khmers Rouges, il y a 35 ans. Et pourtant. En 1975, la guérilla qui se bat depuis plusieurs années contre le régime corrompu du général Long Nol, marche sur Phnom Penh et annonce « la libération » du pays. La population exulte de voir s'achever la guerre civile, mais ce qui les attend est bien pire : les Khmers Rouges sont des idéalistes fanatiques qui rêvent de transformer le pays en une gigantesque coopérative agricole maoïste.
Ils vont orchestrer la révolution la plus brutale de l'histoire du monde : en quelques semaines à peine, ils suppriment totalement la monnaie, font disparaître usines et voitures (considérés comme un héritage de la société impérialiste), font évacuer toutes les villes, et réduisent tous les habitants à l'état de simples ouvriers agricoles, condamnés à exécuter dans les champs les ordres de « l'Angkar » (l'organisation).

Les prisonniers politiques étaient torturés dans cette prison, Toul Sleng, à Pnom Penh.
Aujourd'hui trasnformée en musée du Génocide.


Tous les intellectuels sont impitoyablement éliminés, ainsi que ceux qui osent manifester leur désaccord avec la politique de l'Angkar. Mais la majorité des 2 ou 3 millions de morts sont victimes des conditions de vie terribles qui sévissent alors dans les campagnes.
Cette affreuse page de l'histoire s'achèvera en 1979, quand les voisins vietnamiens viendront envahir le pays pour faire tomber ce régime de terreur. Mais les Khmers Rouges resteront longtemps actifs, d'autant plus que les occidentaux continueront de les soutenir pendant une dizaine d'années...
Une lecture incontournable sur le sujet : Tu Vivras Mon Fils, de Pin Yathay.

Sur la route d'Angkor
30 km après Phnom Penh, crevaison arrière pour Thomas. La faute au pneu, qui commence à faiblir après plus de 13 000 km de bons et loyaux services. Il est déformé maintenant, et à chaque tour de roue le vélo fait un petit « bodom » fort désagréable... Tiendra-t-il jusqu'à Bangkok ? ;-)
A Skun, nous logeons dans la famille d'Aya, et passons la soirée avec un groupe de voisins venus nous dire bonjour et trinquer au vin de palme. Les hommes sont assis en cercle sur une natte, ils chantent des airs un peu faux, rigolent pour un rien ; l'un d'entre eux saisit un seau et joue des percussions, puis mon voisin de gauche s'empare d'une branche de palmier pour jouer de la guitare électrique. J'échappe à la beuverie – le vin de palme n'est pas ma boisson favorite – pour rejoindre Élise et déguster un poulet mariné au citron et au gingembre accompagné d'une bonne plâtrée de riz.


Le sur-lendemain, 31 décembre, nous prenons une chambre dans la petite ville de Kampong Kdei. Nous emmenons nos petits vélos à laver chez le « Rua-xé » (les voilà bichonnés au chiffon et à la mousse, ils sont tout contents !), et rencontrons Meas, qui nous invite à dîner ce soir dans sa famille pour fêter le réveillon !
Sur le modeste balcon de la maison en pilotis, à la lumière d'une ampoule, nous partageons un festin fait de poisson de rivière, de curry de poulet et de riz, tout en écoutant le récit de la vie tourmentée de sa mère, veuve à 30 ans, qui a du élever seule ses trois enfants et ceux de sa sœur. En dehors du salaire de Meas, employé sur le site d'Angkor (200$ par mois), les revenus de la famille sont bien minces. Le frère rapporte 1,25$ par jour en vendant sur le marché des bananes et des fruits cueillis dans la forêt. On rentre se coucher bien avant les douze coups de minuit, mais qu'importe, nous avons appris plein de choses intéressantes, rencontré une famille adorable, et avons pu glisser en partant un petit billet à la maman...

Siem Reap, un goût fugace de sédentarité
Le 1er janvier à 13h, nous arrivons à Siem Reap, troisième ville du pays et destination touristique incontournable pour visiter les temples d'Angkor. Nous y restons une semaine, du jamais vu depuis Istanbul !

Angkor Vat

On loge chez Seyha, un cambodgien qui monte une activité de guide touristique à vélo dans le secteur, puis chez Vincent, un français expatrié qui travaille ici depuis 2 ans pour une ONG. Nous remplissons nos journées à prendre des cours de cuisine, à intervenir dans une école (voir ci-dessous), à visiter, bien sûr, les spectaculaires et incontournables temples d'Angkor, à préparer la suite de notre route en Thailande, ou encore à retrouver des amis francophones de rencontre pour prendre un verre... Le temps d'une semaine, on renoue un peu avec la sédentarité, pour notre plus grand plaisir !

Le volontourisme en débat
L'idée nous trottait déjà dans la tête de nous poser quelque part, et de chercher à « faire quelque chose » dans une école, un orphelinat ou une petite ONG. Une bien belle intention qui nous conduit à découvrir le petit monde du volontourisme : de plus en plus d'occidentaux qui cherchent à « voyager autrement » font appel à des agences spécialisées qui les envoient pendant 2 semaines dans des ONG locales, où ils viennent, par exemple, donner des cours d'anglais à des orphelins. Beaucoup de voyageurs sac-au-dos improvisent aussi, comme nous, un « volontariat » de quelques jours dans telle ou telle association, située sur leur itinéraire.
Mais cette pratique, qui devient un phénomène de masse dans les pays comme le Cambodge où abondent à la fois les ONG et les touristes, pose certaines questions : Quid des compétences des volontouristes, de leur connaissance du contexte ? Quid de l'impact sur l'emploi local ? Le ferait-on, ou le laisserait-on faire, en France ?


A Siem Reap, de plus en plus d'organisations profitent du flot de bonnes volontés pour faire rentrer de l'argent (beaucoup de volontouristes paient pour travailler...), quitte à transformer les écoles et les orphelinats en zoos. Et à la nuit tombée, on trouve encore des enfants vagabonder dans les rues pour distribuer des tracts invitant les touristes à venir visiter leur orphelinat ! Est-ce bien sérieux ?
Un site à visiter à ce sujet : http://www.thinkchildsafe.org/fr/index.html
Nous passons tout de même quelques jours dans un centre tenu par des britanniques, et intervenons dans chacune des classes en racontant, en anglais, notre périple de la France jusqu'au Cambodge.
Bien persuadés malgré tout, avec le recul, que nos multiples petites dépenses quotidiennes, réparties tout au long de la route, dans d'innombrables petites échoppes, dans des marchés de villages et des logements chez l'habitant, ont été bien plus « utiles » que ces quelques leçons d'anglais...

En bateau pour Battambang
Nous quittons Siem Reap à bord d'un bateau qui traverse le lac Tonle Sap, immense réservoir tampon qui absorbe les crues du Mekong, pour rejoindre, sur l'autre rive, la ville de Battambang. La majorité des passagers sont des touristes, mais il y a aussi quelques locaux qui embarquent ou débarquent dans les villages flottants que nous traversons.

Le bateau pour Battambang se faufile dans les marais, sur le lac Tonle Sap.

Sur la rive Sud du lac, des centaines d'hectares de marais et de rizières sont inondés ; le bateau se fraie un passage au jugé, en essayant de suivre le cours de la rivière. Parfois il s'engage dans d'étroits canaux, forçant le passage au milieu des arbres. Plus loin, on voit défiler les habitations temporaires et précaires des pêcheurs, de simples huttes faites d'un morceau de bâche tendu entre quatre bambous...
Nous restons deux jours à Battambang, très chaleureusement accueillis dans la famille de Sarin, Sytha et leurs deux adorables enfants. Eux non plus n'ont pas eu une vie très très facile, entre le travail au casino à la frontière thaïlandaise Puis, bien reposés, nous reprenons la route, à vélo cette fois.
Nous quittons le Cambodge avec des souvenirs de rencontres pleins la tête. Peut-être notre coup de cœur de l'Asie du Sud-Est ? Derrière la frontière thaïlandaise, c'est la dernière ligne droite pour Bangkok, encore distante de 350 km...

Les photos :
20120110 - Cambodge